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Les mots du Chaperon Noir

30 août 2010

« Valentin est Valentine. » Surprise,

« Valentin est Valentine. » Surprise, probablement. Un instant, peut-être à cause du ton, j'ai cru qu'il s'agissait d'une des dernières lubies du concerné. Après tout, n'avait-il pas parfois prétendu qu'il était Valentine ? Au début, pas la moindre idée comment réagir : ironisait-elle ? Était-elle déçue ? Énervée ? Me le disait-elle comme ça parce qu'il s'agissait de la « surprise » ? Angle de vue bizarre, elle tourne la tête comme si elle avait honte, je regarde mon plateau, perplexe. I had no clue how to react. Ouais, c'est ça ce que ça donnerait en anglais. No clue. Puis, lentement, l'ombre du doute : et s'il ne s'agissait pas d'une lubie ? S'il s'agissait de la réalité ? Parce que, c'était curieux quand même. Elle s'est arrêtée à cette phrase. Elle continue : « Plein de petits détails, de coincidences. » Parce que c'est vrai ? C'est pas seulement une lubie ? Voilà ce que j'avais envie de dire. Mais non, je ne pouvais pas. Dur à croire. Curieux. Et puis une sorte de soulagement, un soulagement égoïste, si égoïste : il ne pourrait plus l'accaparer totalement, puisqu'il n'existe pas. Même Valentine, puisque sa vie est bien « meilleure » que la sienne, ne peut pas avoir le même impact sur son être et ses humeurs. Je m'étais résignée, résignée à la partager avec lui. Parce que c'était lui. Qu'il était cliché et fascinant. Mais, elle, je ne sais pas. Elle. Elle, je serai simplement jalouse. Et je repense à l'Horloge Humaine du Crépuscule. Je repense à la Seconde : « Je suis trop dépendante, j'arrête. » C'était avec moi, les délires par sms. On regrettait quand on n'avait plus de forfait. Elle le disait quand elle avait envie de me voir. Puis, il avait empiété. Il était revenu. Et il disparaît ? Et il faudrait que je laisse ça se faire, qu'elle reporte tout sur l'autre, sur la créatrice ? Sur la menteuse ? Non, c'est injure n'est pas sincère, puisque je trouve la manipulations admirable, qu'on soit manipulateur ou manipulé. C'est bien ce que je pensais, je suis égoïste et possessive.
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8 décembre 2009

Voleur de Visages - II

Première Victime
II

<< C'est curieux. >> constata inutilement le médecin.
Une main appuyé sur le menton, et l'autre appuyé sous son coude, il avait adopté la position du Penseur, ce qui ne lui donnait, hélas!, pas l'air plus intelligent.
<< C'est curieux, répéta-t-il, il n'a plus de visage, plus d'yeux, ni de nez, ni de bouche, et pourtant il est toujours vivant et il se déplace sans problème, pas comme un aveugle. En revanche, il ne peut plus parler. C'est curieux, c'est extrêmement curieux. >>
Cette fois, c'en était trop pour la pauvre mère. Elle se leva brusquement, manquant renverser sa chaise.
<< Je m'en fiche!, s'écria-t-elle, je m'en fiche que ce soit curieux ! Je veux que mon fils récupère son ravissant visage, et tout de suite ! >>
Pendant toute sa tirade, elle avait regardé le médecin. Elle avait pris soin de ne pas regarder l'innommable qui jouait silencieusement dans un coin, bien vivant, mais silencieux.
<< Mais je ne peux rien faire, Madame ! >> annonça le médecin.
Toujours levée, la femme hésita un instant, les poings serrés. Elle était jeune encore, trentenaire, et elle était très belle. D'après sa tenue élégante et sa manucure on pouvait deviner un certain désir de plaire. Ce à quoi elle tenait le plus était évident : le regard admiratif des autres. Et un joli fils était l'idéal pour assouvir ces ambitions. En revanche, un enfant sans visage était totalement inconcevable : le regard ne serait plus admiratif.
<< Tant pis, faites-en ce que vous voulez, ce n'est plus mon fils. >> déclara-t-elle froidement et sortit du bureau du médecin en claquant la porte.
L'enfant sursauta. Sans doute avait-il compris quelque chose, mais comment savoir ? Il tourna la tête vers le docteur, qui resta surpris et désemparé devant la peau totalement lisse qui tenait lieu et place de visage à l'enfant.
<< Mais qu'est-ce qu'on va faire de toi ? > demanda-t-il à personne en particulier. Personne en particulier ne lui répondit.

8 décembre 2009

Un Boa Rose Bonbon - II

La tête posée sur ses genoux, les yeux fermés, il se laisse aller à une étisie nonchalante, à une torpeur languissante. Elle lui caresse les cheveux, saisit une mèche, la repose, joue un instant avec une autre, effleure le bord de son oreille, fait un long mouvement, lui chatouille la nuque du bout des doigts. Il ne réagit pas. Il sent sa voluptueuse poitrine au-dessus de son visage, il sent sa chaleur humaine et vivante. La moiteur du lit témoigne de la vie qui est en eux deux. Finalement, elle se demande si elle va articuler les mots qui lui brûlent les lèvres depuis de longs instants, qui dansent sur sa langue derrière le rempart de ses dents jaunies par des années de tabagisme intempestif. D'ailleurs, il tend le bras vers son jean gîsant sur le grand lit et en sort un paquet de cigarettes un peu aplati. À l'intérieur, à peines quelques unes restent, partageant l'espace avec un briquet rouge à la peinture écaillée. Il l'allume sans bouger, en ouvrant à peine les yeux, au risque d'allumer les cheveux de la femme, au risque de lui brûler la peau. Elle ouvre la bouche, la referme pour sourire, tandis qu'il prend une première bouffée.
<< Que me vaut la visite d'un enfant comme toi ? >> demande-t-elle enfin.
Il savait qu'elle allait finit par le lui demander. Il savait qu'il serait alors déjà trop tard. Elle allait finir comme les autres.
Il reste silencieux, le temps de finir entièrement sa cigarette. Contrairement aux autres, elle reste silencieuse, elle attend, elle écoute le silence de la ville somnolente avec lui.
<< Je m'ennuie. >> répond-il.
<< Je comprends. >> qu'elle répond. Que comprend-elle réellement.
Il aiguise sa cruauté. Il l'aimait bien pourtant.
Elle continue à lui caresser les cheveux, avec douceur, de manière cyclique.
Il tend le bras, sans bouger, pose sa main le boa rose bonbon. Il lui avait semblé idéal dès le début.
Mais sa main rencontre une autre main, celle de la femme.
<< Tel est pris qui croyait prendre. >> murmure-t-elle.

7 décembre 2009

Voleur de Visages - I

Première Victime
I

L'homme s'accroupit devant l'enfant assis dans sa poussette. La mère s'était absentée quelques instants, l'inconsciente. Mettant l'objectif face au visage de l'enfant, il régla la netteté puis appuya sur le déclencheur. L'enfant, dans sa naïve innocence, regardait l'objectif avec curiosité, ne comprit pas le sourire de l'homme. Celui-ci se releva, ce même sourire aux lèvres, puis s'éloigna d'un pas tranquille, son appareil photo battant contre son torse.
C'était un bel appareil, noir chromé, avec un objectif totalement réglable manuellement. Il semblait ancien, ce qui était appuyé par le manque de fonctions automatiques et l'absence de flash incorporé. Mais l'aspect, le design étaient résolument modernes. Et surtout, l'aura de l'objet était malsaine.
La mère revint vers son enfant, un sac de légumes pendant à son bras. Elle annonça à son fils :
<< Regarde, je t'ai acheté une sucrerie. >>
Mais l'enfant, dont normalement le babil est ininterrompu, ne répondit pas. Intriguée par ce silence, la mère se pencha vers son enfant après avoir posé son sac.
<< Regarde, dit-elle en se penchant, tu ne veux pas... aah ! >>
Son cri de surprise et d'horreur se poursuivit de longues secondes. Elle avait soudainement pâli, et recula, frémissante de dégoût.
<< Qu'y a-t-il Madame ? >> s'écria-t-on.
Et elle, elle, ne put que tendre un bras vers l'abomination dans la poussette, vers on fils, vers celui qui avait un si joli visage d'angelot. Les gens regardèrent. Une femme s'évanouit.
Dans la poussette, l'enfant n'avait plus de visage.

7 décembre 2009

Un Boa Rose Bonbon - I

Elle portait son sourire comme on porte un boa en fourrure rose bonbon sur des épaules par trop découvertes : avec excentricité et sensualité. Il l'avait remarquée depuis le bout de la rue, cette femme qui se donnait l'air d'être jeune tout en sachant et en affichant son âge. Appuyée contre le mur, elle écoutait deux amies qui discutaient, sans leur répondre, observant avec désintérêt ses longs ongles manucurés et peints de rose fluo. Elle avait des jambes interminables et parfaitement galbées, des hanches trop fines et une poitrine qui avait dû passer entre les mains d'experts chirurgiens. Ses cheveux blonds platine, soigneusement permanentés ondulaient sans classe sur ses épaules dénudées. Son châle avait glissé et reposait à présent sur ses coudes, découvrant un décolleté trop plongeant, enserré dans une mini-robe bustier. Il se demanda comment elle pouvait supporter le froid, si peu vêtue.
Un homme aborda une des amies. Elle salua les autres et partit avec celui-ci.
Il attendait toujours, appuyé contre une porte, dans un renfoncement, les bras croisés.
Bientôt, la deuxième s'en fut aussi.
Alors il se redressa enfin et s'avança vers elle. La rue était à présent totalement vide, les locaux fermés, il devait être aux alentours de quatre heures du matin.
<< C'est combien ? >>
Elle leva les yeux de ses ongles, comme si elle ne l'avait réellement pas entendu approcher. Alors qu'il avait senti sa respiration changer très légèrement à son approche.
<< Je suis trop chère pour toi, chéri. >>
Le ton de la voix empli de pitié, d'amusement. Il regarda ses talons aiguilles Gucci et sourit. Une de ses mains sortit de ses poches et tendit une liasse de billets.
<< Ah oui, tu crois ? >>
Le sourire de la femme ne changea pas. Au contraire, c'était comme si on avait saupoudré le boa de paillettes.
<< Par ici. >>

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Les mots du Chaperon Noir
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